BALLERINA – Len Wiseman
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All about Eve
Incursion féminine dans la saga musclée John Wick, Ballerina offre un divertissement solide. S’il n’est pas une proposition novatrice, il assoit le potentiel d’héroïne de franchise d’action d’Ana de Armas et conserve l’ingrédient le plus réjouissant de la franchise : ses scènes d’action chorégraphiées ultra-inventives.
Dans la franchise aux chorégraphies assassines survitaminées, je demande le spin-off avec un personnage féminin. C’est à peu près à cela qu’on pourrait résumer Ballerina, qui s’inscrit dans la continuité de l’univers John Wick – précisément entre les films numéros trois et quatre. Fort du succès inattendu de la franchise, entamée il y a un peu plus de dix ans, le studio Lionsgate persiste et signe avec ce nouvel opus. Ainsi, Ana de Armas succède à Keanu Reeves – iels se réaffrontent à l’écran après le thriller Knock Knock (2015) – et le réalisateur Len Wiseman (saga Underworld) à Chad Stahelski. Sans être franchement révolutionnaire, cette proposition s’insère parfaitement dans le monde développé par Stahelski, pour une raison assez simple : l’univers de la franchise. Dès le premier John Wick, le scénariste Derek Kolstad, Chad Stahelski et David Leitch donnaient une identité visuelle et narrative néo-noire à cette odyssée centrée autour de la vengeance et la repentance. La trouvaille de cette texture permet une incursion immédiate dans ce monde parallèle de tueuse et tueur à gages ultra-codifié et stylisé aux atours rétro.
Ainsi, quand sont introduits la jeune Eve Macarro et son voyage d’anti-héroïne, les contours de son parcours sont limpides et permettent de se focaliser sur ce qui fait vraiment le sel de ce monde poisseux : l’inventivité du filmage de ses séquences d’action millimétrées. Après quatre films et un passage réussi par la série avec The Continental (2023), force est de constater que la production sait toujours jouer du couteau avec une dextérité flirtant avec le grotesque. Ici, quelques scènes d’anthologie où s’affrontent lance-flammes versus lance incendie, entre deux coups de fusil en équilibre sur une patinoire rythmée par l’apparition télévisuelle de l’immortel Buster Keaton, le cascadeur sur pellicule originel.
Si Wick se débattait pour s’extraire de son passé violent et encombrant en combattant le milieu qui l’avait élevé, cartouche après cartouche, questionnant sa monstruosité, Eve, elle, tente de s’y introduire par tous les moyens. Orpheline, prise dans les guerres intestines de son propre clan, la jeune femme est secourue par la Ruska Roma, organisation mafieuse familière des spectacteur·ices, qui la prend sous son aile pour la métamorphoser en soldate efficiente. Êtres cabossés et animés par la vengeance, Eve et John ont beaucoup en commun, ce que le récit, miroir jamais très subtil, ne cesse de nous rappeler, dans un exercice de passage de bâton de franchise assez paternaliste et franchement dispensable. Univers à la symbolique lourde, qu’elle soit d’inspiration shakespearienne ou biblique, le film ne peut s’empêcher d’appuyer sa position « marketing » sur son héroïne principale, lui accolant le patronyme de la femme originelle. Long-métrage pas franchement féministe mais assez badass et divertissant pour se permettre d’aligner les clichés de femmes empouvoirées et les statements girlboss type « bats-toi comme une fille » sans qu’on sourcille, Ballerina est une petite réussite. Eve avance le couteau entre les dents et de Armas prouve qu’elle a indubitablement les épaules pour porter une franchise d’action, après ses passages remarqués dans À couteaux tirés (2019) et le dernier James Bond, No Time to Die (2021), où ses allures de poupée de porcelaine révélaient une physicalité agile et évidente mais surtout un potentiel comique inattendu.
LISA DURAND
Ballerina
Réalisé par Len Wiseman
Avec Ana de Armas, Ian McShane, Anjelica Huston
U.S.A, 2025
Se déroulant pendant John Wick : Parabellum, Ballerina suit la vengeance implacable d'Eve Macarro la nouvelle tueuse de l’organisation Ruska Roma.
En salles le 4 juin 2025.